J’entends de plus en plus dire "Je me suis prostitué à..." ou "branleur". Non, que ma fréquentation des immigrées de l’est ou des adolescents sur-hormonés n’aie augmentée. Je suis, simplement, de plus en plus sensible à l’utilisation de ces termes à connotation sexuelle dans le langage quotidien.
Le premier point commun que je remarque entre ces expressions est qu’elles relèvent du même glissement rhétorique : la généralisation sélective.
Ainsi dans "se prostituer" on généralise une partie de la sombre réalité correspondante pour en garder : "faire quelque chose à contre cœur pour de l’argent" parfois "faire quelque chose de dégradant pour de l’argent". Ce qui est frappant c’est que cette "prostitution élargie" devient doucement synonyme d’emploi tant les conditions de travail se sont dégradées.
De même, les "branleurs" deviennent ceux qui "tirent un plaisir de choses inutiles à la société". Ce n’est pas nécessairement jouissif, ce n’est pas forcément solitaire mais c’est considéré comme vain. Ce qui est frappant c’est que c’est assez facilement synonyme de loisirs.
Mais, avec cette analyse on voit que ces deux glissements sont en réalité finement liés, et finissent par former l’agenda quotidien du citoyen moyen. Il se prostitue dans la journée à un emploi ou un système qui ne lui convient pas, et se "masturbe" dans des loisirs le reste du temps à la recherche d’un plaisir (souvent compensatoire).
Ce langage métaphorique révèle sans doute l’étendue de l’aliénation moderne.
Si l’on continue de filer cette métaphore, peut on espérer trouver une échappatoire, une solution ? Généralement, la masturbation et la prostitution sont assimilées à des formes dégradées de sexualité. La sexualité idéale s’en distingue car elle est : partagée, équilibrée et recherche le plaisir des deux partenaires. De plus elle s’inscrit dans une relation de confiance durable permettant d’en assumer (ou de profiter) ensemble les(des) "conséquences". Ce qui n’empêche pas de se répartir des rôles, et que des déséquilibres se produisent parfois. Pourtant l’équité et la richesse de la relation (sexuelle ou amoureuse) sont assurées par un changement régulier et concerté de ces rôles.
Il reste donc maintenant à trouver comment dans notre quotidien (professionnel et personnel) peut on retrouver ce rapport amoureux à la vie, fait d’équité (et de dissymétries choisies) et de partage du plaisir (et de ses conséquences).